Depuis quelques temps, je surveille le comportement alimentaire de Nana.
Elle dévore, tout simplement.
Au début, on ne faisait pas trop attention, c'est venu progressivement, et puis un enfant qui mange, hein...
Et puis, elle se dépense, fait du sport... mais quand même...
Elle est capable de finir l'assiette de son frère après avoir fini sa deuxième ration.
De se resservir plusieurs fois... trop de fois.
Elle m'a raconté qu'elle finit les assiettes des autres à la cantine, et que désormais, les dames de la cantine viennent systématiquement lui proposer les restes.
Il est devenu évident que c'est devenu symptômatique...nouveau signe de son mal-être.
Ce midi, saucisses+ petits-pois.
Elle demande une 2ème portion de petits-pois, je lui donne. Au moment de prendre le dessert (un gâteau que j'avais fait), elle réfléchit: "je me demande si je ne vais pas prendre des pâtes d'abord" (il y en avait dans le frigo). Je lui dis qu'elle a suffisamment mangé, et elle se contente d'une part de gâteau.
Ce soir, tarte aux poireaux. Elle mange 2 parts, me dit que ça suffit, je lui demande ce qu'elle veut ensuite, elle demande si c'est encore du chaud ou du froid? Je lui explique que c'est le dessert, on a déjà eu le plat chaud... Et j'aborde enfin le sujet.
Elle ne doit pas se resservir plusieurs fois au cours du même repas, pour le moment, elle n'a pas de problème de poids, mais si elle continue comme ça, ça pourrait venir et c'est dommage.
Dans le courant de la discussion, elle m'explique:
- qu'elle a plaisir à manger tout ça
- qu'elle a l'impression d'avoir encore faim
- et pire, qu'elle se dépêche de manger pour pouvoir se resservir!
Je lui ai parlé des mécanismes de la faim et de la satiété, du fait d'écouter son corps comme elle le faisait naturellement jusqu'ici, et que le plaisir vient de l'aliment et de la convivialité, non du fait d'en manger tant qu'il y en a.
J'ai eu le sentiment qu'un bout d'enfance s'en allait encore... un bout d'insouciance... Parce que maintenant, elle va faire attention, chercher à se contrôler, se poser mille questions... et risque de traquer la moindre rondeur, le moindre défaut... Et ça aussi ça pourrait devenir symptômatique.
Tout cela n'est pas une réelle surprise, ce sont les choses habituelles que traversent les enfants abusés... Qu'ils doivent surmonter tant bien que mal.
A côté de ça, quand même, il y a eu du positif.
Je crois lui avoir arraché un bon bout de culpabilité ces derniers jours, en lui expliquant que j'avais entamé des démarches de mon côté avant ce fameux jour à la brigade des mineurs, parce que je savais que ça n'allait pas, et qu'on aurait fini par savoir ce qui se passait de toute façon.
Je la sens mieux, plus légère... Nous verrons dans les jours qui arrivent.
Comme il est long, le chemin...
Wednesday, November 14, 2007
Sunday, November 11, 2007
Sa dernière journée
Le 12 novembre 2006, elle a vécu sa dernière journée. Je ne sais pas ce qu'elle a fait ce jour-là.
Elle a été tuée dans la nuit. Au petit matin du 13 novembre.
Ce qui rend les choses difficiles pour moi, c'est que je suis seule dans mon coin pour vivre ça. Personne dans mon entourage ne l'a connue. Personne n'imagine quelle douleur est la mienne, ni combien je ressens cruellement son absence.
Ton absence....
Je me souviens d'un soir de 2002, quelque part entre fin avril et début mai. Nous nous étions retrouvés dans un restaurant parisien, toi, moi, nos maris, leur mère, leur soeur, des amis de leur mère.
Un restaurant mexicain où manger n'était pas ce qui comptait le plus. Vous avez bu, dansé. Pas moi. Moi, je caressais mon ventre, et je vous regardais.
La soirée était avancée, tout le monde est rentré, sauf nous. Nos maris, toi, moi. Tu étais agréablement ivre. Heureuse. Nous discutions avec d'autres noctambules qui s'étaient attardés au restaurant. En fait, non, nous étions déjà dehors à ce moment-là. Je ne sais pas pourquoi, tu as parlé de celui que j'attendais.
"Nous allons lui faire une belle vie", as-tu lancé.
Cette phrase ne m'a pas quittée, sans doute en souvenir de cette soirée unique, pleine de bonheur et d'insouciance. Et aussi parce que c'est l'un des oracles les plus loupés du monde. Si tu savais...
Si tu savais, qu'on n'a pas fait une belle vie à mon fils. Ni à ma fille, ni à la tienne.
Si tu savais, que moi je suis toujours là. Et que je suis seule, seule pour toujours, avec cette douleur qui ne finira jamais, parce que ta mort est injuste, cruelle, absurde, parce que je n'ai pas pu te dire adieu, parce que je n'ai pas pu dire que je t'aimais, toutes ces années à nous fréquenter et jamais je ne te l'ai dit, et pourtant, si tu savais l'importance que tu as eu dans ma vie, si tu savais combien ton absence m'empêche d'être heureuse, même si je proclame sans cesse le contraire, si tu savais combien je regrette, toutes ces années gâchées, toutes ces horreurs que l'on s'est dites, si tu savais combien je souhaite me réveiller de ce cauchemar, te serrer dans mes bras et te le dire, que je t'aime et que tu ne dois pas partir.
Mais tu n'es pas là, tu ne seras plus jamais là, et je ne suis pas d'accord avec ça. Un an que je lutte contre cette idée. Je ne veux pas qu'on arrive au jour anniversaire de ta dernière journée. Je ne veux pas accepter de me réveiller au matin du 13 sans toi... Irrémédiablement...
Pourtant je sais que c'est puéril, je sais que je vais continuer de vivre, je sais que j'aurai à affronter, seule, notre belle-famille, ceux qui nous ont détruits, nos enfants et nous. Je sais que je n'ai pas le choix et que je dois continuer, même si c'est sans toi.... sans toi, pour toujours.
Elle a été tuée dans la nuit. Au petit matin du 13 novembre.
Ce qui rend les choses difficiles pour moi, c'est que je suis seule dans mon coin pour vivre ça. Personne dans mon entourage ne l'a connue. Personne n'imagine quelle douleur est la mienne, ni combien je ressens cruellement son absence.
Ton absence....
Je me souviens d'un soir de 2002, quelque part entre fin avril et début mai. Nous nous étions retrouvés dans un restaurant parisien, toi, moi, nos maris, leur mère, leur soeur, des amis de leur mère.
Un restaurant mexicain où manger n'était pas ce qui comptait le plus. Vous avez bu, dansé. Pas moi. Moi, je caressais mon ventre, et je vous regardais.
La soirée était avancée, tout le monde est rentré, sauf nous. Nos maris, toi, moi. Tu étais agréablement ivre. Heureuse. Nous discutions avec d'autres noctambules qui s'étaient attardés au restaurant. En fait, non, nous étions déjà dehors à ce moment-là. Je ne sais pas pourquoi, tu as parlé de celui que j'attendais.
"Nous allons lui faire une belle vie", as-tu lancé.
Cette phrase ne m'a pas quittée, sans doute en souvenir de cette soirée unique, pleine de bonheur et d'insouciance. Et aussi parce que c'est l'un des oracles les plus loupés du monde. Si tu savais...
Si tu savais, qu'on n'a pas fait une belle vie à mon fils. Ni à ma fille, ni à la tienne.
Si tu savais, que moi je suis toujours là. Et que je suis seule, seule pour toujours, avec cette douleur qui ne finira jamais, parce que ta mort est injuste, cruelle, absurde, parce que je n'ai pas pu te dire adieu, parce que je n'ai pas pu dire que je t'aimais, toutes ces années à nous fréquenter et jamais je ne te l'ai dit, et pourtant, si tu savais l'importance que tu as eu dans ma vie, si tu savais combien ton absence m'empêche d'être heureuse, même si je proclame sans cesse le contraire, si tu savais combien je regrette, toutes ces années gâchées, toutes ces horreurs que l'on s'est dites, si tu savais combien je souhaite me réveiller de ce cauchemar, te serrer dans mes bras et te le dire, que je t'aime et que tu ne dois pas partir.
Mais tu n'es pas là, tu ne seras plus jamais là, et je ne suis pas d'accord avec ça. Un an que je lutte contre cette idée. Je ne veux pas qu'on arrive au jour anniversaire de ta dernière journée. Je ne veux pas accepter de me réveiller au matin du 13 sans toi... Irrémédiablement...
Pourtant je sais que c'est puéril, je sais que je vais continuer de vivre, je sais que j'aurai à affronter, seule, notre belle-famille, ceux qui nous ont détruits, nos enfants et nous. Je sais que je n'ai pas le choix et que je dois continuer, même si c'est sans toi.... sans toi, pour toujours.
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