Alors, que s'est-il passé dans ma vie durant ces 18 mois de silence?
Les montagnes russes... Ca définit bien cette période.
Des moments forts et drôles, le plein d'amitié surtout, et puis des choses dramatiques.
A l'image de cette journée si particulière, ce 8 mai où nous prépariions la kermesse de notre association, une journée pleine de joie et de dynamisme, les amis, les discussions, les rires... et puis ce coup de téléphone de ma soeur à ma mère, qui était chez nous pour 3 jours, ce coup de téléphone terrible... les médecins lui avaient demandé si on souhaitait que mon père soit réanimé...
Mon père... le géant de mon enfance.
Des mois à s'éteindre à petit feu... ma mère en larmes à plusieurs reprises au téléphone, pensant que c'était fini, et moi, touchant du doigt ce que ça pouvait être, un monde sans père... c'était simplement impensable.
Mes adieux à mon père... 3 jours entre fin avril et début mai.
Lui, terriblement amaigri, sur son lit d'hôpital. Ne pouvant plus rien faire. Rien.
La tête était à nouveau là, après avoir été absente un temps. Là, il assistait à sa déchéance physique, il savait qu'il n'y avait plus rien à faire... Et les médecins qui nous disaient que ça pouvait durer des années.
Des années.
Des années de souffrances permanentes. De dépossession de soi. Ne plus pouvoir rien faire, rien décider, dépendre des autres pour tout, et souffrir...
Alors je lui ai parlé. Je lui ai dit qu'il pouvait partir. Qu'il avait suffisamment lutté. Que mes frères et soeur et moi, nous étions heureux. Qu'on reprenait le flambeau de ses luttes politiques et syndicales. Qu'on l'aimait et qu'il nous manquerait. Qu'on ne laisserait pas ma mère.
Ma mère, qui était venue nous ramener les enfants à la maison - nous les avions laissés quelques jours de plus. Mon père était retourné à la maison de retraite (qu'il a finalement peu connue et c'est tant mieux)... la directrice a appelé pour prévenir d'un malaise.
Mon père...un malaise... refrain tellement connu pour nous tous. Ma soeur et mon frère m'ont raconté après. Ils ont fini de ce qu'ils avaient à faire. Pas pressés. Parce qu'on connaît trop bien l'attente dans les salles du même nom de l'hôpital. S'ils avaient su...
Ils ont pu voir mon père... Qui a eu un nouveau malaise devant eux... Irreversible.... D'où la question du médecin.
Non. On ne ranime pas. Qu'on le laisse partir...C'était notre décision depuis longtemps.
Nouveau coup de fil de ma soeur... Pour prévenir que de toute façon, la question ne se posait plus. Aucune réanimation possible. Plus rien d'autre à faire qu'à le veiller.
Ce qu'ils ont fait, pendant quelques heures...
Mon père est mort le soir du 8 mai, dans une salle des urgences, entouré par mon jeune frère et ma soeur, tandis que ma mère et moi, nous étions à 500km de là.
Nous sommes partis le lendemain.
Il y a eu les préparatifs... Le racket des pompes funèbres. L'attente. La redécouverte des photos. Des lettres.
La redécouverte de mon père, d'un père que j'avais perdu de vue toutes ces années, drôle et heureux....
La prise de conscience, tardive, tragiquement trop tardive, que son pessimisme pesant était dû à la maladie... Maladie qui l'a bouffé la moitié de sa vie. Qui a bouffé ses relations avec moi.
Les regrets, les remords...
Le retour, après la cérémonie.
Et depuis...
Mon père n'est pas mort. Je ne m'en remets pas. Je ne réalise pas. Ce n'est pas possible. Pas possible que ce soit pour toujours.
Je sens sa présence. Je le sens à côté de moi. Je m'apprête à le voir, à l'entendre... Il me faut parfois plusieurs secondes pour me souvenir qu'il est mort...
Mon esprit n'arrive toujours pas à l'admettre.
Il me manque, énormément, extrêmement.
Et j'ai un chagrin énorme en pensant à ses derniers moments, si affreux, j'en veux à la société de nous avoir conduit à nous occuper si mal des personnes dépendantes.
Voilà. Je suis orpheline de père. Et je n'arrive toujours pas à croire que ce soit vrai...
Friday, March 22, 2013
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6 comments:
J'ai encore mes deux parents, j'appréhende leur absence au point d'être parfois paralysée d'angoisse. Je comprends d'autant mieux le séisme que cela doit être de perdre son père, lorsqu'on l'a aimé et qu'il a été aussi présent que le tien.
Je t'embrasse très tendrement Lily et j'espère que ta vie reste belle.
Je suis grand mère donc je n'ai plus mes parents, ma mère est morte jeune, elle n'avait que 65 ans, oui nos parents meurent mais nous pensons à eux, ils ne meurent vraiment que le jour où personne ne pense plus à eux...heure-bleue
Tant que tu penses à lui il n'est pas mort, ça va faire 10 ans que papa a tiré sa révérence mais il est toujours avec nous.
mab- bricolgirl qui a quitté overblog pour
http://lesautresetmoi1.canalblog.com
heureuse de te relire
Bonjour, je découvre ce message avec beaucoup de retard et je pense beaucoup à vous. Nos parents vivent en nous parce qu'ils nous ont forcément transmis tant de choses... même si la présence physique manque... comme la tendresse d'un conjoint qui vous a plaqué ;-(...
Pour moi c'était un 28 novembre...
Cela fait 10 ans que mon père est décédé mais j'ai toujours autant de chagrin...
Je m'en sors en me disant qu'il est penché sur mon épaule où que j'aille!ça me réconforte.
Les personnes que nous aimons ne nous quittent pas,elles sont seulement dans la pièce à coté!
Courage mon amie tu n'es pas seule.Gros bisous.
martine
Je tombe sur ton message au bout de 6 mois.. quelques jours après le 11 novembre.
Et ce soir, j'ai une pensée pour toi.
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