Thursday, February 03, 2011

L'école...

Le midi, un petit garçon, fils d'une copine, vient manger avec nous. Ca lui évite l'enfer de la cantine.
Mardi, nous étions de retour à l'école pile à 13h30. Les grilles se fermaient, les élèves étaient déjà en rang.
Ce matin, la copine m'a appelée, son fiston s'est fait gronder et punir pour ce que la maîtresse a considéré comme un retard - la classe partait à la piscine dans la foulée, lui n'y allait pas, il fallait l'emmener dans une autre classe avec du travail, nous aurions dû arriver avant.

C'est quoi ce monde où des enfants se font punir pour les erreurs des adultes? Parce qu'un enfant de 6 ans qui est en retard (et techniquement nous ne l'étions pas...) c'est quand même davantage la responsabilité de l'adulte qui l'accompagne, non?

L'école est décidément l'endroit le plus injuste qui existe. Qu'on ne me rétorque pas que "c'est comme partout ailleurs et les enfants doivent se faire leurs armes": non, aucun autre endroit n'est aussi injuste et humiliant que l'école. Nulle part, en tant qu'adulte, on ne nous impose une loi rigide, obtuse, inique, nulle part ailleurs qu'à l'école nous ne sommes soumis au bon vouloir de petits chefs sans aucune possibilité de réagir, de se défendre - nulle part ailleurs si ce n'est à l'armée.
Et ça n'aide pas les enfants à se faire leurs armes, ça leur apprend à s'écraser pour ne pas avoir plus de problème, ça leur apprend à subir en fermant leur g****.

Etrangement, lorsque les parents mettent leur grain de sel, c'est rarement à bon escient. Je crois que peu de personnes réalisent ce qui se passe réellement derrière les grilles.
Peu de personnes, mais j'en fais partie, hélas. J'ai trop d'empathie. Trop mal pour les écoliers, sans cesse brimés, bridés, brisés parfois. Décidément, je n'aime pas l'école, je n'aime pas la manière dont on appréhende l'éducation aujourd'hui, et j'aime encore moins les réformes qui se succèdent et la détruisent sans cesse plus au lieu de proposer autre chose, plus humain, plus ouvert, plus tourné vers l'enfant - plus souple et plus efficace. (Je suis désolée si je peine les collègues enseignants qui me lisent; je sais que le métier est dur pour plein de raisons, je sais que nous sommes nombreux à faire "du mieux que nous pouvons" en pensant sincèrement que "c'est pour leur bien"... Le système et ceux qui y participent restent néanmoins injustes, inhumains et contre-productifs pour les enfants)

Aujourd'hui, j'ai encore plus mal à tout ça pour deux raisons: parce que ma grande est au collège et le collège, c'est encore pire que l'école. On m'avait prévenu, je constate. Elle n'attend qu'une chose, la déscolarisation. Parce qu'actuellement, elle va en cours pour ne rien apprendre, et pour se faire martyriser par les profs, les autres adultes du collège, et les petits caids dont tout le monde a peur, adultes du collège en premier (et si je ne la déscolarise pas immédiatement, c'est pour une raison indépendante de notre volonté.)

Et puis aussi parce que je reprends le travail finalement, pour quelques mois, parce que nous avons besoin de sous pour déménager, un peu loin, d'ailleurs nous avons eu les 500 points supplémentaires pour conjoint handicapé, donc la mutation (autant garder le métier sous le coude en cas de pépin avec notre café associatif) c'est dans la poche. Dans quelques mois nous serons ailleurs, alors ce sacrifice personnel vaut le coup.
Je reprends donc le chemin des écoliers le mois prochain, avec un mois d'avance sur la fin de mon congé parental, parce que le besoin d'argent est pressant, parce que Libellule est plus ou moins prête pour se passer de moi quelques heures par jour - sachant qu'elle restera avec son père dont elle est très proche.

Je reprends un métier qui m'a toujours rendue perplexe, que j'ai de moins en moins aimé à mesure que je l'ai exercé. Pour toutes les raisons que j'ai souvent évoquées ici. Et parce que prise dans le tourbillon des jours et des semaines, je deviens ce que je n'aime pas; je me perds parfois, devenant tout ce que je n'aime pas chez une maîtresse.

Quelques mois... Quitte à reprendre, le cœur d'autant plus lourd que je laisse ma Libellule, autant m'amuser. Prendre ça avec légèreté. J'aimerais être une May Poppins avec un sac à malices....

8 comments:

Bismarck said...

As-tu pensé à prendre ta retraite? (Je veux dire: avec 3 enfants et sans doute 15 ans de service, tu toucherais une misère, mais peut-être mieux que rien?)
Bon courage, de toute façon!

Sophie said...

mais non ce n'est pas partout pareil ;) et toi dans le métier tu peux faire changer des choses (bon c'est plus facile dans une équipe qui va dans ton sens que totalement réfractaire, je te l'accorde) !!

Benedicte said...

Il y a des élèves qui vont drolement avoir de la chace, durant ces quelques mois :)

co de contes said...

et si tu profitais de ce petit bout de temps pour faire bouger les choses?ils auraient bien de la chance tes élèves...

Luna Part said...

"Nulle part, en tant qu'adulte, on ne nous impose une loi rigide, obtuse, inique, nulle part ailleurs qu'à l'école nous ne sommes soumis au bon vouloir de petits chefs sans aucune possibilité de réagir, de se défendre - nulle part ailleurs si ce n'est à l'armée."

Détrompe-toi, c'est le lot de beaucoup de salariés dans le privé (avec la menace permanente "tu n'es pas content, tu t'en vas, y en a des dizaines qui attendent ta place" et des syndicats de moins en moins présents voir absents dans les petites structures).

J'espère que tu n'auras pas à exercer ton métier trop longtemps car je doute que les enfants apprennent beaucoup d'un adulte désabusé et démotivé :-(
(je ne dis pas ça contre toi, mon frère était instit et il a préféré partir travailler à l'inspection académique tout seul dans un bureau au bout de 30 ans de carrière, donc j'imagine ce que tu peux ressentir)

LiliLajeunebergere said...

Bismarck, je n'ai pas assez d'ancienneté ;)

Sophie, malgré tout, l'école d'aujourd'hui ne se base pas sur les besoins/envies/possibilités de chaque élève à un moment M (où les apprentissages seraient facilités, cf Maria Montessori notamment) mais sur un rythme de classe prédéfini dans lequel chaque enfant est tenu de cadrer (inutile de parler du taux d'échecs ). Sans parler du reste, rien que pour cette raison, je me pose la question de mon utilité - et je trouve ça monstrueux pour les élèves.

A l'ouest, j'espère bien, nous verrons :-)

Co de Contes, je ne sais pas si je pourrai faire grand chose en quelques mois, mais pourquoi pas :-)

Luna Part, certes, j'y avais même pensé... En tout état de cause, ce n'est pas une raison pour faire subir ça aux enfants dès la maternelle. Un monde plus juste, ça passe peut-être justement par un réel respect dès le berceau?

Par contre il y a un malentendu: mon principal souci, c'est justement les enfants! Donc avec eux ça se passe bien. Je suis désabusée par la machinerie, pas par eux. Au contraire, une grosse partie des activités de notre café est tournée vers eux, je vais animer des ateliers créatifs et scientifiques que je prépare déjà! Je fais mon métier avec sérieux rassure-toi, j'essaie surtout de rendre ça moins pénible (voire plus rigolo) pour les élèves, entre autres en faisant ce qui passe souvent à l'as: sport, arts, sciences.

Valérie de Haute Savoie said...

Certaines écoles sont encore humaines, les petites, des petites villes. Le tout est de supporter les petites villes.

Bonne chance pour ce retour au boulot, c'est toujours assez douloureux de laisser derrière soi son enfant tout petit.

Névrosia said...

Je crois que c'est aussi une question de personnes, de point de vue et de chance.

Nos enfants ont vécu des moments difficiles en maternelle où il est plus facile pour enseignant nocif de faire du mal, mais en primaire il y a eu globalement plus de profs sympas, bienveillants et professionnels que de petits tyrans.

En entrant au collège Toutgrand a eu du mal à s'adapter à plusieurs caractères différents, plusieurs façon d'enseigner différentes et aux attentes différentes, mais je crois que ça fait partie des apprentissages de la vie que de savoir composer avec des intervenants différents. Aujourd'hui il a trouvé sa place, notamment en tissant des liens avec des copains qui lui sont précieux.

Je n'arrive pas à être totalement désabusée de l'école tant je vois autour de moi des enseignants qui luttent pour le bien de leurs élèves.
Ce qui est sûr c'est que les réformes font tout pour détruire l'école publique et c'est contre le gouvernement qu'il faut lutter.

Vous déménagez ? Il va falloir que je passe chercher le banc alors ! :-)

Vous allez chercher le soleil ?