Wednesday, November 23, 2005

Post décousu

Finalement, les émeutes auront servi à une chose: je n'ai plus à faire le tri de mes ordures (en fait, le tri en lui-même ne me dérange pas, ce qui me dérange, c'est de glisser mes emballages dans la fente jaune et d'entendre des bruits de bouteilles en verre, un peu l'impression de faire ça pour rien). En effet, monsieur le maire de ma commune nous a punis de bennes à ordures, vu que certaines d'entre elles ont brûlé -ce n'était pourtant pas la première fois. Donc plus de bennes, plus de tri, enfin si, je continue pour le papier dont la benne est plus loin, mais le reste, dans un sac, que je dépose à l'endroit habituel, oùsqu'il n'y a plus ni bennes ni sacs poubelle.

Je me demande ce que mes voisins font de leurs sacs poubelles???? c'est un mystère que je ne m'explique pas. C'est quand même extraordinaire que je sois presque la seule de la cité à braver l'interdit et à ne pas utiliser mon vide-ordure personnel, ainsi qu'on me l'a demandé dans une circulaire: soyez civiques (le mot est écrit noir sur blanc), utilisez le vide-ordures de votre cuisine.
Le mien je l'ai condamné en arrivant dans l'appartement, et il est hors de question que j'ouvre ce nid à microbes.

Et je suis en colère, à l'idée que c'est une fois de plus les gens de mon quartier, qui n'ont pour 99% d'entre eux rien à se reprocher en ce qui concerne les émeutes, qui doivent payer les conséquences de ce qu'ils ont déjà subi. Un peu comme la double peine.

Je suis en colère qu'on me demande à moi d'ouvrir la gueule puante et infestée de mon vide-ordure. C'était en quelque sorte la chose de trop. Je me suis demandée ce que je faisais là avec mes mômes, dans cet appart qui pue parfois la clope à cause des voisins, dans lequel mes enfants ont du mal à s'endormir le soir à cause des abrutis qui habitent au dessus de chez nous et qui n'ont jamais dû entendre le mot "respect", avec des poubelles qui ont déjà brûlé plusieurs fois dans ma cage d'escalier. Si un jour j'en ai les moyens (hum......), je prendrai mes gosses sous les bras, pour partir dans un endroit plus correct, en laissant ici ceux qui n'ont pas les moyens de faire autrement..... Ce n'était pourtant vraiment pas ça, l'image que je me faisais de la liberté, de l'égalité et de la fraternité.......

Et pourtant, malgré le tableau que je brosse grossièrement, je ne vis pas dans le pire quartier de la pire banlieue ni dans le pire appart qui soit. Mais quand même, j'ai compris pourquoi bien des personnes font le calcul -rapide- qu'elles ne vivent pas mieux en bossant qu'en vivant des alloc. Moi-même, qui ai un salaire correct, je ne m'en sors déjà que difficilement. Je ne m'en sortirais pas plus difficilement en arrêtant de bosser pour réclamer les minima sociaux.

Alors pourquoi est-ce que je ne saute pas le pas? J'ai été tentée pendant quelques jours.... Quitte à ne pouvoir faire aucun projet, à ne pas pouvoir offrir de vacances à mes enfants, à avoir un mal fou à joindre les deux bouts, pourquoi est-ce que je n'arrêterais pas de travailler, pour scolariser les enfants à la maison? pas plus de fric mais beaucoup moins de stress....

Alors?

Alors je suis trop honnête pour ça!!
Et il y a autre chose aussi....

J'étais en stage de formation ces 3 dernière semaines. Certains jours, nous n'avions aucune formation prévue, nous devions juste être dans nos écoles..... Je me planquais pour que mes élèves ne me voient pas, pour que ma remplaçante ait la paix (ils sont petits et n'auraient pas trop compris pourquoi j'étais à la fois là et pas là)
Vendredi dernier, il ne restait plus que 3 jours, et puis c'était la fin de la journée, je me suis assise dans le couloir pendant que mes élèves mettaient leurs chaussures et leurs manteaux, et en 2 secondes, je me suis retrouvée engloutie par 20 paires de bras, 20 bouches qui toutes voulaient m'embrasser, et les cris d'excitation des petits qui répétaient mon prénom en boucle: "K-Tiiiiiiiiiiii, K-Tiiiiiiiiiiiiiiiii".

Ils me manquaient, j'avais envie de retourner tout de suite en classe avec eux. Ces 3 dernières semaines, je piaffais d'impatience de retourner dans ma classe, je bouillonnais de mille idées, de mille folies. L'envie débordante d'embarquer mes élèves dans ma galère, et de voir où elle nous mènera.

Je ne bosse pas seulement pour le fric, mais surtout pour moi. Pour voir les yeux brillants de mes élèves, des yeux où je vois un reflet positif de ma petite personne (ha bon? C'est mégalo? Tant pis!!! si c'est ça qui me fait continuer....)

Oui je sais, c'est bizarre, un post qui commence par les poubelles et finit par mes élèves.... mais faut mieux ça que l'autre sens!!!!

5 comments:

Anitta said...

Et tu voudrais quitter cette petite foule joyeuse de tes "élèves" ? Mais comment abandonner tant d'amour ? :)

Anonymous said...

Trop mignonne la fin

LiliLajeunebergere said...

vroumette, j'espère que je laisserai ce genre de souvenir!!

Anitta, c'est clair, je ne peux pas résister!!!

Jid, la fin à partir d'où?

Anonymous said...

c'est super émouvant quand on se rend compte que les enfants/élèves se sont vraiment attaché à nous.
quand j'ai fait mon stage de 3 semaines en école primaire, je ne faisais rien juste assise au fond de la classe, une classe tellement occupée à leur bavardage que je pensais qu'ils ne me voyaient meme pas.
ET apres la fin du stage je suis revenue (pour offrir des chocolats à tout le monde) et les élèves m'ont dit: "mais tout t'étais?"""moi j'ai eu 9/10 en math!" etc etc
on se rend compte qu'on est pas un meuble !!

LiliLajeunebergere said...

cédric, je fais partie des privilégiés et j'en suis consciente, malgré le blues parfois, et l'impression de n'aller nulle part.

kousinn, arrête de boire ;-)
les rapports qu'on a avec les enfants sont les plus humains qui soient, et chaleureux avec ça....
j'espère que tu auras le concours de prof et que tu pourras en profiter à longueur d'année comme moi!!