Je m'étais depuis longtemps promis de ne surtout pas fêter la fête des mères ni celle des pères lorsque je serais devenue instit. La mine de ma princesse devant son cadeau de fête des pères qu'elle ne pouvait offrir à personne lorsqu'elle était en petite section et qui ne faisait qu'enfoncer le couteau dans la plaie ("mon papa ne veut plus me voir") m'avait confortée dans cette idée.
Par contre, je trouve ça chouette de recevoir des cadeaux de ses enfants, alors j'avais songé à des cadeaux qu'on offre quand on veut à qui on veut.
Une fois n'est pas coutume, j'ai eu du bol en démarrant dans cette école: la "fête des parents" y avait été instaurée. Un cadeau et une carte (j'ai choisi de faire 2 cadeaux), que chaque enfant offre à qui il veut, entre les 2 fêtes.
Mais s'il n'est pas trop difficile de dire aux enfants qu'ils peuvent offrir le 2è cadeau à leur grand-père ou à leur oncle, par exemple, dans le cas de familles monoparentales, ça l'est nettement plus de dire que si on n'a pas de maman parce qu'elle est morte, on peut toujours offrir le deuxième cadeau à son oncle.
Du coup, je n'ai rien dit aux enfants. Je me suis contentée d'expliquer qu'on faisait des cadeaux pour les parents. On en avait fait pour Noel et Pâques déjà, donc la différence n'était pas marquée. Certains sont venus me voir lundi, en me demandant si on pouvait faire un cadeau pour leur maman? Du coup je me suis faite plus explicite: oui, justement, nous fabriquons deux cadeaux, c'est pour la fête des parents, l'un d'eux, celui qu'ils veulent, sera pour leur maman. Mais le tout en aparté, à ceux qui venaient m'en parler.
Mais je ne pouvais pas jeter les cadeaux dans les mains de ma petite élève sans maman et débrouille toi.
Jeudi matin, tandis que j'emballais les cadres photos, elle est venue se coller à la table où j'officiais. "A qui vas-tu offrir ce cadeau?" "A mon papa."
Bon, une bonne chose de faite.
Le lendemain, j'emballe les pots de fleurs. Rebelotte. "Tu vas l'offrir à qui, celui-là?" "A mon tonton." "D'accord, super". Et elle continue: "parce que ma maman elle est dans la tombe, elle est morte après une grande maladie".
Voilà, c'est dit. J'ai réalisé après coup pourquoi je n'étais pas parvenue, jusque là, à affronter les réponses qu'elle risquait de me donner: en début d'année, elle m'avait soutenu que c'était sa maman qui lui avait donné le rouge à lèvres dont elle s'était barbouillé le visage lors d'une récréation. J'essayais d'insister "mais non, voyons, ce n'est pas ta maman", mais elle n'en démordait pas.
J'avais peur qu'elle en soit toujours là. Qu'elle considère toujours sa maman vivante. Comment aborder les choses dans ce cas? comment l'inciter à trouver quelqu'un d'autre à qui offrir ce cadeau? Et en grand groupe, comment aborder la mort d'une maman? Le fait qu'une maman ça peut mourir?
Après cette discussion privée, j'ai pu revenir sur les destinataires des cadeaux en grand groupe, et j'ai recommandé de bien continuer à arroser les fleurs (elles n'ont pas daigné pousser en classe, ça fait donc un peu ridicule comme cadeau, tant pis.... )
Finalement, j'ai évité le pire -laisser la petite se débrouiller - et j'ai plus ou moins rempli mon rôle. Plutôt moins que plus, c'est certain, mais au moins, les choses ont été dites.
Sunday, June 04, 2006
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7 comments:
bonsoir c est une bonne idée car il y a de plus en plus de famille monoparetale hélas enfin c est la vie quand a moi mes filles pensent a la féte des pères et me demande comment vont elles faires pour le cadeau vu que mon ex habite a 1200 km et ne les prends jamais .caramba& la poste est la a bientot aurélie
je vien de lire ta note et je trouve que c est bien car moi étant seule avec mes filles et mon ex habitant a 1200 km (oui je sais ça fit quand meme )lol pour la fetes des papas le cadeau elles le mettent de coté jusqu au vaccances d été car elles souhaitent lui remettrent a cette période vu qu il ne les prends pas aussi non bref je trouve que c est une bonne idée a bientot la mono a( au faite j ai arrété mon blog faute de tepmps )
Comme c'est triste, une petite fille sans maman... Je trouve que tu as très "géré" (je déteste ce mot) la situation quand même.
En te lisant j'eprouve un sentiment bizarre. Je suis sur que ce n'est pas simple de gerer ces vies monoparentale.
Le cadeau c'est bien mais n'est ce pas perdre son essentiel(sans rentrer dans le debat pour ou contre fete commercial) en generalisant sur les parents?... Meme si la mere est morte, le gosse a le droit de lui faire un cadeau pour "honorer" sa memoire. Exemple: garder le cadeau pour qu'au futur Noel le Bonhomme rouge puisse lui rapporter a cette maman qui est dans le ciel...
Meme si c'est dans la tristesse ne faut il pas affronter la crise et en informer le parent qui vient chercher cet enfant? Lors de la premiere rencontre avec le parent lui expliquer comment au mieux peut on gerer s'il y a probleme, crever l'abces en fait... je ne sais pas.
Sur le temps, meme si les cours sont generaux, a-t-on le temps de resoudre le probleme personnel de l'enfant? Surement pas mais ne peut on pas etre plutot un vecteur? Pour une direction qui semble etre plus juste pour soi et donc pour l'enfant dans le soucis de l'amelioration.
(Je viens de me rendre compte que c'est une vison purement capitaliste des sentiments, des fois j'suis bete,je ferme la parenthese)
En tout cas, je ne pense pas que la mort soi si tabou pour un enfant (te souviens tu de ta Cendrillon dont la mere est morte...) c'est la grande personne qui s'identifie a l'enfant en face de lui, s'il evite de parler de la mort. Et ca devrait plutot etre l'inverse, que l'enfant s'identifie au dernier parent certes triste mais qui regarde la vie toujours de face.
En tout cas, quel abnegation car pas simple que d'etre la maitresse de p'tiots.
Mais question: n'existe t il pas des conf pour aider les adultes travaillants avec les enfants organise par le ministere chapoteur?
Oui, ça n'est pas facile, tout ça, mais tu as bien géré, c'est super (mais drôlement triste...)
Moi ce qui m'impressionne, c'est la justesse de la réflexion de la petiote.
Garder le cadeau pour que le bonhomme le ramène à la maman... Non je ne pense pas que ce soit une bonne idée.
D'abord parce qu'un jour ou l'autre elle saura la vraie histoire du père noël. Et qu'elle se sentira doublement trahie !
Et aussi, parce que c'est tellement grand de la voir accepter la vérité, calmement, et accepter de la dire, pour préférer donner son cadeau à quelqu'un à qui elle tient... maintenant.
Le fait qu'elle parle librement (du moins c'est ce qui me semble) de sa maman "qui est dans la tombe" me paraît très sain. Elle a compris, accepté et maintenant elle peut avancer, avec l'amour de ceux qui l'entourent.
En même temps, c'est mon avis et j'y connais rien.
La mono, je pense que je ferai comme ça tous les ans!Pour ton blog, ce n'est que partie remise ;-)
flourig, oui ça me brise le coeur :-(
jemetone, oui, on peut parler de la mort avec un enfant, et j'aurais dû crever l'abcès effectivement, savoir ce que la fillette savait exactement, mais je n'en ai pas eu le courage....
Non, aucune aide pour nous aider à aider....
simone, merci, et oui :-(
Lalaith, moi aussi ça m'a impressionnée! et je trouve ça plutôt bien.... Elle sait, c'est essentiel.
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